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Bénis sont les parents qui peuvent se flatter de cohésion entre leurs enfants
- Voir aussi Gérer différents niveaux
La question de la cohésion entre nos enfants s’est posée bien souvent. Il arrive qu’ils se disputent, qu’ils ne[s2If current_user_cannot(access_s2member_level2)] partagent rien. A bien des égards, ç’a parfois même été une souffrance pour nous car nous n’avons pas toujours su y faire. Il nous a fallu beaucoup d’échecs et de remises en question pour commencer à voir le bout du tunnel. Oh ! ça n’a jamais été plus loin que des disputes avec quelques échauffourées sans gravité, mais parfois il y avait un vrai ressentiment. C’est entre filles que ce fut le plus dur, disons de la part de la plus grande, parfois plus intransigeante, parfois narquoise voire cruelle.
Avec les années, nous nous sommes aperçus que c’était surtout… notre innocence et notre bonne foi qui nous avaient induits en erreur. En faisant le mieux possible, on se trompe.
Nous ne prétendons pas avoir « réussi », les choses ne sont pas « parfaites » chez nous et nous apprenons tous les jours. Si vous venez nous voir, vous ne trouverez pas la famille Bibliothèque Rose et Verte, bien coiffée sur le côté et bardée de diplômes de meilleurs citoyens de l’année ! Mais nous avons appris à regarder, à observer et à tirer des enseignements. Il nous arrive fréquemment de conclure que nous avons fait un mauvais choix il y a quelques années. Il nous arrive de nous dire « bon sang ! mais c’est bien sûr, il fallait faire autrement ! »
Et nous savons aussi que… ce que nous savons sera en partie « redécliné » avec un autre enfant, car aucune opinion n’est définitive en éducation.
En principe, le but est d’éviter les disputes et d’entretenir la paix, apprendre le quant-à-soi, l’humilité suffisante pour ne pas se hérisser pour un rien et accueillir son frère ou sa sœur avec amour. En principe. Mais quand on applique les mesures qui découlent directement d’une logique d’amour humain et de paix, on obtient souvent l’inverse.*
Ni l’individualisme ni le collectivisme ne marchent pour créer de la cohésion. Pour une bonne cohésion, il importe d’abord que chacun soit rassuré, respecté et respire ! La plupart des querelles ne viennent pas d’un litige, mais d’un manque d’espace. La plupart des querelles, disons-nous, relève d’un problème territorial. Mais aussi d’un manque d’adversité !
Absence d’adversité = conflit
Commençons par là. Les jeunes couples sont persuadés que les enfants vont naturellement s’aimer, parce qu’ils seront de bons parents, comme dans un magnifique épisode de la Petite Maison dans la Prairie.
En réalité, si l’on est de bons parents qui font tout ce qu’ils peuvent pour donner amour et paix et leurs enfants, ceux-ci vont… se « déchirer grave » (comme disent nos « moyens ») ! Si les personnages de la Petite Maison dans la prairie jouent plus juste qu’on le pense, c’est parce qu’ils sont en permanence dans l’adversité. Regardez chaque épisode: dans une dimension philosophique, biblique et symbolique, ce chef-d’œuvre télévisé incompris et faussement naïf engage l’être humain au plus profond. C’est à la fois suffisamment proche de la réalité et suffisamment stylisé pour que les principes profonds soient idéalement illustrés dans un tableau court (le format épisode télévisé).
Il y a là une adversité qui lie les êtres humains entre eux. Il n’y a pas d’équilibre dans la sécurité immobile, il n’y en a que dans le mouvement vivant.
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On observe parfois une très forte cohésion entre enfants battus (nous l’avons noté quand nous avons évoqué le problème de la colère), ou entre enfants de parents très sévères, façon « Enfants du capitaine Grant » (chef d’œuvre de Jules Verne à acquérir pour transmettre aux enfants une image de la dignité) et on se demande pourquoi. Dans le même temps, on se dispute dans les familles stables. Pourquoi ?
Sachons-le, des individus, quels qu’ils soient, seront toujours enclins à se disputer et se diviser s’ils sont confinés dans un même lieu sans qu’aucune menace extérieure ne les solidarise, s’il n’y a pas d’adversité extérieure.
La notion de territoire
L’être humain a besoin de maintenir sa capacité combattante à un niveau suffisamment élevé d’une part et d’autre part de protéger son autonomie et sa particularité.
Les parents se scandalisent quand ils apprennent que leurs bambins se sont bagarrés. Mettez-les, eux parents, à 30 dans une salle de classe pendant un an, huit heures par jour, vous serez surpris par le nombre de bagarres qui se produiront. En prison ou sur les cargos, dans tous les espaces confinés, les bagarres sont fréquentes, certes à cause des prédateurs naturels dans la société, mais aussi à cause du confinement. Les Russes qui étaient obligés de partager un appartement à plusieurs à cause de la suppression de la propriété privée par les communistes, vivaient des querelles et des agressions perpétuelles, l’un d’eux racontait que la détestation et la méfiance étaient si puissantes entre familles dans un même immeuble que les gens retiraient toutes les ampoules électriques à chaque fois qu’ils quittaient une pièce pour les réinstaller dans la pièce où ils allaient: quand le collectivisme conduit à l’hyper-individualisme.
Première leçon à en tirer: ne faites pas du collectivisme ni de l’individualisme. Ces deux excès manifestés de manière caricaturale par les deux fameux systèmes communistes et capitalistes sont tout de même rares en famille.
On est « ensemble » mais aussi « chacun »
N’empêche, si certaines tâches doivent être effectuées en commun pour créer de la cohésion, comme on le verra plus loin, chacun doit aussi se sentir unique.
Et inversement, il ne doit pas y avoir un culte de la propriété privée ou du territoire chacun à soi; certes, chacun à sa chambre, son espace et ses affaires, mais tout n’est pas dans une existence privée et loin des autres, il y a aussi des choses et des espaces partagés.
Janus Korczak attirait l’attention sur ces petits objets que les enfants trouvent dans le jardin et dont ils se font un trésor, plume, caillou etc. et il disait que si ces objets n’étaient à personne en particulier, ils devenaient la source de disputes et la proie des plus forts. Il recommandait donc de bien reconnaître la propriété privée, l’attribution de ces objets. Mais en même temps, il recommandait le partage. Ces deux pôles vous permettent d’équilibrer toujours votre attitude. En toute chose: mesure et équilibre.
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Mais revenons à cette notion de territoire. Les bagarres entre gangs sont permanentes, les bons sentiments n’y pourront rien, c’est une question de confinement sur un territoire donné. Vous remarquerez que si vous grattez sur les questions de violence urbaine, vous retrouvez très vite la notion de territoire, c’est le premier échelon du vivant, ça existe chez les rats, les papillons ou les poissons.
Exercer ses facultés combattives pour maintenir une vitalité
Prenons un couple en dispute. C’est naturel : ses deux membres sont (…) la suite et la vidéo est à découvrir dans votre accompagnement (cliquez ici) (membre accompagné, connectez-vous. En cas de souci, voir la FAQ). [/s2If] [s2If current_user_can(access_s2member_level2)]partagent rien. A bien des égards, ç’a parfois même été une souffrance pour nous car nous n’avons pas toujours su y faire. Il nous a fallu beaucoup d’échecs et de remises en question pour commencer à voir le bout du tunnel. Oh ! ça n’a jamais été plus loin que des disputes avec quelques échauffourées sans gravité, mais parfois il y avait un vrai ressentiment.
Avec les années, nous nous sommes aperçus que c’était surtout… notre innocence et notre bonne foi qui nous avaient induits en erreur. En faisant le mieux possible, on se trompe.
Nous ne prétendons pas avoir « réussi », les choses ne sont pas « parfaites » chez nous et nous apprenons tous les jours. Si vous venez nous voir, vous ne trouverez pas la famille Bibliothèque Rose et Verte, bien coiffée sur le côté et bardée de diplômes de meilleurs citoyens de l’année ! Mais nous avons appris à regarder, à observer et à tirer des enseignements. Il nous arrive fréquemment de conclure que nous avons fait un mauvais choix il y a quelques années. Il nous arrive de nous dire « bon sang ! mais c’est bien sûr, il fallait faire autrement ! »
Et nous savons aussi que… ce que nous savons sera en partie « redécliné » avec un autre enfant, car aucune opinion n’est définitive en éducation.
En principe, le but est d’éviter les disputes et d’entretenir la paix, apprendre le quant-à-soi, l’humilité suffisante pour ne pas se hérisser pour un rien et accueillir son frère ou sa sœur avec amour. En principe. Mais quand on applique les mesures qui découlent directement d’une logique d’amour humain et de paix, on obtient souvent l’inverse.*
Ni l’individualisme ni le collectivisme ne marchent pour créer de la cohésion. Pour une bonne cohésion, il importe d’abord que chacun soit rassuré, respecté et respire ! La plupart des querelles ne viennent pas d’un litige, mais d’un manque d’espace. La plupart des querelles, disons-nous, relève d’un problème territorial. Mais aussi d’un manque d’adversité !
Absence d’adversité = conflit
Commençons par là. Les jeunes couples sont persuadés que les enfants vont naturellement s’aimer, parce qu’ils seront de bons parents, comme dans un magnifique épisode de la Petite Maison dans la Prairie.
En réalité, si l’on est de bons parents qui font tout ce qu’ils peuvent pour donner amour et paix et leurs enfants, ceux-ci vont… se « déchirer grave » (comme disent nos « moyens ») ! Si les personnages de la Petite Maison dans la prairie jouent plus juste qu’on le pense, c’est parce qu’ils sont en permanence dans l’adversité. Regardez chaque épisode: dans une dimension philosophique, biblique et symbolique, ce chef-d’œuvre télévisé incompris et faussement naïf engage l’être humain au plus profond. C’est à la fois suffisamment proche de la réalité et suffisamment stylisé pour que les principes profonds soient idéalement illustrés dans un tableau court (le format épisode télévisé).
Il y a là une adversité qui lie les êtres humains entre eux. Il n’y a pas d’équilibre dans la sécurité immobile, il n’y en a que dans le mouvement vivant.
On observe parfois une très forte cohésion entre enfants battus, ou entre enfants de parents très sévères, façon « Enfants du capitaine Grant » (chef d’œuvre de Jules Verne à acquérir pour transmettre aux enfants une image de la dignité) et on se demande pourquoi. Dans le même temps, on se dispute dans les familles stables. Pourquoi ?
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Sachons-le, des individus, quels qu’ils soient, seront toujours enclins à se disputer et se diviser s’ils sont confinés dans un même lieu sans qu’aucune menace extérieure ne les solidarise, s’il n’y a pas d’adversité extérieure.
La notion de territoire
L’être humain a besoin de maintenir sa capacité combattante à un niveau suffisamment élevé d’une part et d’autre part de protéger son autonomie et sa particularité.
Les parents se scandalisent quand ils apprennent que leurs bambins se sont bagarrés. Mettez-les à 30 dans une salle de classe pendant un an, huit heures par jour, vous serez surpris par le nombre de bagarres qui se produiront. En prison ou sur les cargos, dans tous les espaces confinés, les bagarres sont fréquentes, certes à cause des prédateurs naturels dans la société, mais aussi à cause du confinement. Les Russes qui étaient obligés de partager un appartement à plusieurs à cause de la suppression de la propriété privée par les communistes, vivaient des querelles et des agressions perpétuelles, l’un d’eux racontait que la détestation et la méfiance étaient si puissantes entre familles dans un même immeuble que les gens retiraient toutes les ampoules électriques à chaque fois qu’ils quittaient une pièce pour les réinstaller dans la pièce où ils allaient: quand le collectivisme conduit à l’hyper-individualisme.
Première leçon à en tirer: ne faites pas du collectivisme ni de l’individualisme. Ces deux excès manifestés de manière caricaturale par les deux fameux systèmes communistes et capitalistes sont tout de même rares en famille.
On est « ensemble » mais aussi « chacun »
N’empêche, si certaines tâches doivent être effectuées en commun pour créer de la cohésion, comme on le verra plus loin, chacun doit aussi se sentir unique.
Et inversement, il ne doit pas y avoir un culte de la propriété privée ou du territoire chacun à soi; certes, chacun à sa chambre, son espace et ses affaires, mais tout n’est pas dans une existence privée et loin des autres, il y a aussi des choses et des espaces partagés.
Janus Korczak attirait l’attention sur ces petits objets que les enfants trouvent dans le jardin et dont ils se font un trésor, plume, caillou etc. et il disait que si ces objets n’étaient à personne en particulier, ils devenaient la source de disputes et la proie des plus forts. Il recommandait donc de bien reconnaître la propriété privée, l’attribution de ces objets. Mais en même temps, il recommandait le partage. Ces deux pôles vous permettent d’équilibrer toujours votre attitude. En toute chose: mesure et équilibre.
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Mais revenons à cette notion de territoire. Les bagarres entre gangs sont permanentes, les bons sentiments n’y pourront rien, c’est une question de confinement sur un territoire donné. Vous remarquerez que si vous grattez sur les questions de violence urbaine, vous retrouvez très vite la notion de territoire, c’est le premier échelon du vivant, ça existe chez les rats, les papillons ou les poissons.
Exercer ses facultés combattives pour maintenir une vitalité
Prenons un couple en dispute. C’est naturel : ses deux membres sont sur un même territoire et sont privés d’adversité. Pourquoi se disputent-ils ? Pas seulement parce qu’ils ont besoin d’évacuer l’agressivité naturelle : des congrégations vivent dans un calme parfait, les moines ou les moniales ne se bagarrent pas. L’être humain n’est pas une bête brutale contrairement à ce que l’on entend souvent dans cette culture anti-homme.
En revanche, il a besoin d’exercer ses facultés mentales de combativité, l’exercice de son agressivité est indispensable à sa survie et à celle de sa progéniture, il faut qu’il soit, mâle ou femelle, en permanence capable de combat et cette faculté commence à l’intérieur, c’est une prédisposition intérieure à réagir, une prédisposition à traverser la rue pour empêcher qu’un enfant soit renversé ou coller une gifle à un inconnu qui aurait un geste très déplacé. S’il perd cette faculté, cette faculté de réaction dont il n’aura peut-être jamais à se servir, il devient… légume.
Les tribunaux jugent en permanence sur des histoires de violences domestiques sans avoir la moindre notion éthologique ou ethnologique des nécessités du vivant. Un homme, une femme, a besoin d’être suffisamment en alerte, capable de réaction.
Les adultes se disputent parce que la société leur interdit de se battre, ils exercent leur faculté combative là où c’est possible : à la maison, à l’abri des regards. Je dis souvent qu’on devrait envoyer les jeunes voyous combattre le feu dans les maquis en été, plutôt qu’en prison. L’exercice de la violence naturelle est le meilleur antidote contre la violence. Obliger un homme à refouler sa violence ne peut que le détruire ou détruire son entourage (les sociétés héroïques savaient tout de même ça mieux que nous), et la vraie non-violence ne peut qu’admettre et reconnaître la violence naturelle (heureusement que les pompiers se battent violemment contre le feu !), en la canalisant.
Bref, les couples qui se disputent entretiennent la plupart du temps leurs réflexes d’autodéfense naturelle. Vous pensiez que les monastères étaient les temples du calme et de la sérénité ? Ils sont en fait emplis de combats, des combats spirituels, souvent bien plus terribles que dehors. Exerçant ces combats, l’être humain peut donner de lui-même et maintenir son niveau de combativité. Combat d’amour, combat mystique, certes, mais combat quand même !
L’agression extérieure
Les réflexes agressifs baissent dans deux cas majeurs : lorsqu’on pratique une activité exténuante ou physiquement satisfaisante, et lorsqu’une agression extérieure se produit. Vous avez l’image typique de la femme qui vient d’insulter son mari et qui se précipite dans ses bras parce que le voisin vient de jeter une brique à travers la vitre du salon: toute agressivité conjugale se dissipe miraculeusement et instantanément !
En revanche, si rien ne perturbe la « bonne ambiance », la dispute va s’installer ! Incroyable, non ?
Vous pouvez remercier le Ciel de vous envoyer des épreuves, elles sont nécessaires pour la paix sociale et votre santé mentale.
Faites attention à la bonne ambiance, ne laissez pas les choses au niveau du calme plat et de la bonne humeur gentille et polie : c’est une bombe à retardement ! Faites bouger les lignes de la bonne ambiance. Les taquineries sont parfois excellentes, voire davantage. Les chicanes sont des exercices d’alerte.
Si beaucoup d’enfants battus sont solidaires, c’est parce qu’ils affrontent un ennemi commun. Il ne s’agit évidemment pas de vous mettre à agresser vos enfants, mais en revanche abandonnez les postures « bon copain » ou « bonne copine » qui ne vont faire qu’exacerber les tensions entre vos enfants. Une distance juste, et même une certaine rigidité (comme le capitaine Grant) de votre part peut, si elle est intelligente, ressouder les liens entre vos enfants. Vous les laisserez naturellement organiser leurs « résistance » à votre « ordre dictatorial » (rassurez-vous, nos adolescents nous disent que nous aussi, nous sommes des dictateurs). Surtout si vous avez un grave problème. Pour éviter de leur « refiler » le bébé, de transposer sur eux vos problèmes, faites une ligne de démarcation afin qu’ils établissent un no-man’s land protecteur pour eux et favorisant leur cohésion. Si vous êtes sur le point de divorcer, n’essayez surtout pas de vous rapprocher de l’enfant au détriment de l’autre parent, vous feriez beaucoup de mal. Mettez-vous plutôt d’accord avec l’autre parent pour être tous les deux à une juste distance de vos enfants; juste, c’est-à-dire sans les impliquer, de façon à ce qu’ils recomposent, ensemble, un nouveau monde mental. Plus tard, quand ils seront adultes, vous retrouverez avec eux des liens d’une grande affection.
Indifférenciation
L’indifférenciation résulte de la promiscuité sur un territoire donné et sans que l’individu puisse affirmer ce qu’il est et ce qu’il peut donner.
Je me permets de vous demander de relire cette phrase.
Elle est l’une des premières raisons d’agressivité entre enfants. Nous sommes dans une société de masse, de l’indifférenciation, ce qui est « identité » est mal vu. Ça explique en grande partie l’agressivité de tous les jours.
Pour empêcher de sombrer dans l’indifférenciation, l’être va développer sa combativité, son agressivité. C’est normal et c’est aussi bon, contrairement à une ambiance du type que celle imposée par les « gentilles paroissiennes » de notre société médiatique, qui a tendance à refuser tout antagonisme et toute dispute. Regardons Marius, Fanny ou la Femme du Boulanger, vous verrez qu’il y a 60 ans, on avait plus d’énergie et plus de voix. Nous nous sommes dévitalisés. Nous nous sommes domestiqués. Quand on parle un peu plus haut, on est très vite mal vu.
Mais les jeunes ne peuvent pas supporter cette chape de plomb !
La dispute est un réflexe de survie. Elle entretient un niveau d’autodéfense suffisant pour que l’individu ne soit pas sans ressources lorsque l’agression arrivera ou quand il aura besoin d’agir. L’agressivité est maintenue à un niveau suffisamment élevé par l’individu lui-même, afin qu’il ne perde pas sa capacité à se défendre**.
L’observation a été faite dans le monde animal. Un couple de ciclydes (des petits poissons) se dispute tant qu’il n’y a aucune agression extérieure, par exemple territoriale. En période de paix, le couple voit diminuer fortement ses capacités belliqueuses ainsi que sa vitalité. Il faut donc qu’il réagisse et c’est naturellement que l’on se tourne vers le conjoint pour exercer sa vitalité. Les querelles commencent et peuvent aller loin si aucun danger n’apparaît à l’horizon du bocal. Les choses s’aggravent d’heure en heure et cela peut aller jusqu’au meurtre, en général de la femelle. En revanche, si le chercheur met un autre ciclyde dans le bocal, aussitôt le couple se ressoude, pour organiser sa défense contre l’inconnu, l’usurpateur d’une partie du territoire et l’envahisseur ! C’est parlant, n’est-ce pas ?
Un conte taoïste raconte: des bateliers s’en prennent violemment à un homme dont la barque a heurté leur navire, mais le lendemain la même barque, vide, heurtant leur navire, ne leur inspire aucune colère. C’est le fait qu’il y ait un homme dans la barque qui permet d’exercer l’agression, de vider une colère. C’est tout à fait explicable, comme on l’a vu, et c’est vrai aussi dans la société des hommes.
Le don indispensable
Par ailleurs, la notion de don est vitale, un enfant qui ne peut pas donner de lui-même dépérit. Il s’agit donc, non pas d’apprendre à l’enfant à donner, mais c’est nous en tant qu’adultes qui devons apprendre à recevoir de la part des enfants, ainsi l’enfant donnera sans avoir appris, sa générosité naturelle se développera normalement.
Tout le monde sait que ce sont les enfants de familles nombreuses qui ont le plus de capacité de résistance et de sociabilité, et ce, parce qu’ils sont dans un jeu de tensions, de négociation, de concurrence qui attisent leur émancipation et leur autonomie.
Quelles méthodes tirer de tout cela ?
Pour la cohésion : particularités
La première chose à faire est de traiter les enfants chacun en reconnaissant concrètement leur particularité, et cela signifiera des sorties seul à seul avec lui, des activités qu’il sera seul à faire, des raisons pour lesquelles il sera valorisé. Avec une bonne image de lui-même, l’enfant acceptera beaucoup mieux les autres.
Sur le plan scolaire, on s’assure que chacun reçoit ce dont il a besoin. C’est le multi-niveaux dont nous avons parlé il y a quelques jours.
Le problème, c’est souvent que nous voulons traiter les enfants dans un esprit d’égalité. C’est très bien mais lorsqu’on les traite tous de la même manière, on tombe exactement dans le piège de l’indifférenciation.
Les combats anodins
Il est normal que l’enfant ait envie d’exercer sa capacité à se battre et même s’il est souhaitable que les enfants ne se battent pas, vous ne pourrez toujours l’éviter. Pas de panique. Changez le ton, dédramatisez !
J’entre dans la chambre où baffes et coups commencent à s’échanger. « Chouette ! une bagarre, m’écriai-je. Mais attendez, on organise les choses. Par terre, on met des coussins, si vous sortez de la limite vous perdez une manche (notez bien ce « une manche », ça veut dire qu’on est dans un jeu et qu’il n’y aura pas un combat définitif). « Attention, le combat va commencer » (ici on dit subrepticement qu’il y a des règles, ni vu ni connu), « d’abord saluez-vous ! » (et vous montrez comment on se salue).
Ça n’a l’air de rien, pas vrai ? mais en trois phrases vous avez transformé la bagarre méchante en une compétition honorable dont ils ressortiront l’un et l’autre tout à fait dignement et sans avoir perdu la face. Par la suite, j’ai observé que les enfants avaient besoin de reproduire l’intégralité du rituel et les bagarres restaient dans les limites saines d’un défoulement sanitaire…
Pour les plus grands, la querelle menace. Instituez des joutes oratoires, avec un public qui jugera sur des feuilles, et notera chaque intervenant. Ou autre chose. Ritualisez. Faites tourner le « coussin de parole », celui qui a le coussin parle et les autres écoutent, etc. Utilisez un chronomètre comme lors d’un débat pour la Présidentielle…
Il y a toujours moyen de canaliser l’énergie agressive, qui n’est donc pas malsaine.
Pour la cohésion : pas d’égalité, de l’équité !
Il faut une justice, une équité. Beaucoup moins une égalité. C’est toute la différence. L’égalité de traitement nivelle chacun, le rend semblable aux autres, et produit un besoin vital de différenciation. Plus vous ferez entrer dans le moule un être humain, plus vous aurez des chances de le voir se rebeller et se comporter d’une manière spécifique et même exagérée par rapport à ce qu’il voudrait réellement.
La reconnaissance et la pratique de la reconnaissance sont donc fondamentales. Sortez avec lui, avec elle, et rien qu’avec lui et elle. Un parent peut très bien dire : « Aujourd’hui je sors avec Louise et rien qu’avec elle ! » Ou « Ah ! je vais faire ma partie d’échec avec Théo ! » Les autres ne vont pas lui en vouloir, ils vont mimer la jalousie, mais ils vont surtout aussitôt penser : « Mon tour viendra. » En traitant chacun avec une attention spéciale, vous reconnaissez leur spécificité.
Mettez par écrit, en début de semaine, ce que vous pourriez faire avec chacun.
Pour la cohésion : responsabiliser
De même, vous confierez des responsabilités précises et pas forcément les mêmes à tour de rôle. Pour certaines tâches, comme faire à manger, coudre un bouton, repasser le linge, lancer une machine, nettoyer les sanitaires ou débarrasser la table, tout le monde doit y passer, ce sont des savoirs indispensables. Mais l’un des enfants sera peut-être plus doué pour tailler les rosiers, ce sera sa tâche et celle de personne d’autre. Un autre est bon pour nettoyer les ordinateurs, une autre pour aller à la mairie, etc. Trouvez ce que chacun peut faire, parlez-lui en.
Pour la cohésion : espace naturel
Vous permettrez un espace d’expression personnelle, et ce sera aussi bien moral que physique. Il faut un endroit où l’enfant est seul et pratique quelque chose qu’il aime. Ne mettez pas deux garçons qui ont tendance à être en compétition dans le même club de foot !
Vous pouvez très bien interdire à deux enfants de s’approcher durant une période de temps s’ils ne se supportent plus. Mettez-les à dormir dans des lieux très éloignés. Comprenez qu’ils ont besoin de respirer, de ne plus voir l’autre. Donnez-leur à faire des choses différentes. Différenciez.
Pour la cohésion : pas de comparaison
Veillez à détruire les velléités de comparaison. Si vous faites l’école à la maison à plusieurs enfants, vous verrez très vite qu’un enfant a tendance à vouloir se valoriser aux yeux de ses parents en disant qu’il fait mieux, plus vite, que son frère ou sa sœur. Même à l’école, l’enfant veut briller plus que les autres frères ou sœurs. C’est une tentation normale. Vous ne l’encouragerez pas. « Comparaison = punition », disait cette maman qui en avait 5. Chacun a son rythme, nous avons vu que la rapidité n’était pas une qualité en soi, qu’elle pouvait être un atout ou un inconvénient. Et puis on expliquera que chacun fait son possible à son niveau. Les plus grands ont tendance à dire « pft ! c’est facile ce qu’il fait », vous les arrêterez en leur apprenant que la difficulté du petit frère est proportionnellement aussi importante que les leurs, et puis à aider leur petit frère ou petite sœur, en l’accompagnant, sans se substituer à elle ou lui, bref, en apprenant aux plus grands à encourager les plus petits. Organisez les choses, prenez le plus grand avec vous avant un cours et dites-lui entre 4 yeux : « Aujourd’hui, j’ai besoin de ton concours, je voudrais que tu… » et vous donnez une mission à votre aîné ou aux aînés.
Cela ne veut pas dire qu’il ne faille pas de temps en temps de la compétition.
Pour la cohésion : projets communs
Il y a enfin une arme fatale pour bien faire : l’esprit d’équipe. Faites des projets ensemble. Préparez des spectacles de fin d’année ou de Noël, ou de Pâques. Un public sera là. Que faire ? Ce qu’on voudra : de la danse ou une scène d’un livre, d’une pièce de théâtre. Réaliser une toile devant le public, jongler etc. Mieux vaudrait, dans l’idéal, un très beau texte qu’ils interpréteront car s’il y a quelque chose qu’ils vont mémoriser mieux qu’autre chose cette année, c’est ce qu’ils auront fait durant le spectacle. C’est normal : le cerveau ancre mieux les choses apprises qui ont procuré une émotion. Corneille, Racine, Shakespeare, Daudet, un grand texte dépasse de très loin le reste.
Les enfants qui se disputeront pendant les répétitions, seront solidaires devant le public que vous ferez venir, ils seront liés ensemble dans cette mission et ils garderont un souvenir fraternel. Croyez-nous, ils ne se souviendront que du spectacle.
Si vous voulez que les enfants soient solidaires plus tard, faites-leur faire des choses ensemble: spectacles, marche en montagne, camping.
Vous voyez: équilibre entre
- la différenciation et le traitement spécial (je sors avec ma fille et rien qu’elle, je vais faire un tennis avec mon fils et rien qu’avec lui)
- l’ouvrage en commun (spectacle de théâtre, sortie au cinéma tous ensemble…).
Pour la cohésion : Exploitez l’adversité
Et puis n’oubliez pas : l’adversité rend puissamment solidaire. Vous imaginez bien que toute la famille oublie les disputes quand les huissiers sont là, quand le voisin menace ou quand un enfant a un accident. En cela, toutes les sociétés vivantes se ressemblent. Chez les poissons mêmes, les liens sont resserrés quand un ennemi attaque le domicile conjugal ou qu’une menace pèse, alors que le reste du temps le couple se déchire. Chez les corbeaux, les querelles cessent lorsqu’un congénère est blessé.
Parfois, la vie vous donnera des occasions d’élever l’attention de vos enfants à des préoccupations, des choses graves. Vous éviterez évidemment de leur faire peur, de les charger d’un poids trop lourd pour eux, n’allez pas leur dire que vous craignez d’avoir un cancer. Un parent sait qu’il y a des choses à ne pas dire.
Mais la vie vous offrira tout de même des événements pas drôles du tout et qui serviront à faire grandir vos enfants en les rendant plus proches les uns des autres. Vous aurez une conversation solennelle, très solennelle. La grand tante qui est malade. Vous demanderez ce que l’on pourrait faire pour elle. L’un proposera d’écrire, l’autre de dessiner. Les disputes seront oubliées et les enfants seront ensemble, unis. Les choses graves qui arrivent dans la vie peuvent être dites, avec bien sûr, nous le répétons, beaucoup de discernement. Faire l’école à la maison peut très bien vous inspirer de temps en temps une conversation grave. Cela renforce des liens.
Les sanctions peuvent être collégiales : tout le monde puni pour la faute d’un seul, oui, mais à condition que ce soit un système durable, si ça n’arrive qu’une fois, vous aurez créé une brebis galeuse ! Rien de pire que de punir un seul enfant pendant que toute la famille est à table et fait la fête. Il y a un moment pour les punitions. Si nous distinguons chacun dans les bons moments (sorties avec un seul par exemple), nous pouvons décider que tout le monde sera puni de film un soir de vacances parce que, dans l’ensemble, l’ambiance des enfants était exécrable. Et même si l’un d’eux s’est très bien tenu. Voilà qui va peut-être choquer, mais si un seul enfant échappe à la punition, il se retrouve en situation de privilégié et il va concentrer le ressentiment contre lui. En outre, il peut être bon qu’il soit solidarisé par rapport au groupe, car il sera conduit à se dire que s’il a été parfait pour lui-même, il n’a pas su s’assurer qu’il en allait de même pour les autres. Il a failli par omission. A voir, n’est-ce pas ?
C’est un peu compliqué mais nous disons cela pour que vous ne culpabilisiez pas si un jour vous avez puni à tort.
Nous pouvons même ajouter qu’il n’est pas dramatique que vous ayez puni à tort un enfant, une fois ou deux, car il aura progressé. Comment ? Mais tout simplement en apprenant, à son corps défendant, qu’il peut y avoir des injustices ! Lorsqu’il sera victime d’une injustice plus tard, il ne tombera pas des nues. Ressentir une injustice va faire grandir son sens de la justice, et de même il va apprendre que ses parents peuvent se tromper, ce qui est un apprentissage indispensable ! C’est ainsi qu’il va développer son autonomie et une juste distance à ses parents.
Avez-vous pris des notes ? Pensez-y de temps en temps. Et laissez-nous vos commentaires ci-dessous.
*: l’amour divin est beaucoup plus vaste, l’amour humain se cantonnant essentiellement dans un sentiment et une manière d’être qui satisfait autant celui qui donne que celui à qui il est donné. L’amour humain n’est jamais totalement désintéressé, car la plus grande générosité vise toujours à atteindre un objectif. On voit souvent l’amour divin comme quelque chose d’extrêmement sentimental, pacifique, « cool ». C’est évidemment limiter l’amour divin dans nos conceptions personnelles, sentimentales, consensuelles, convenables. L’amour divin n’a évidemment pas grand chose à voir avec une vision convenue, il est pour les êtres humains indéchiffrable. Le fils prodigue est aimé alors qu’il est au-milieu même de son pire malheur… voilà quelle forme l’amour de Dieu peut prendre. On sera donc, en tant que parents, capables de dépasser une vision gentillette.
**: Sur ce sujet je vous recommande l’excellent livre de Konrad Lorenz:
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Sur Konrad Lorenz, une rubrique Wiki.[/s2If]