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L’enfant est-il intelligent ?

L’enfant est-il « intelligent » ? suivi de Ce qu’est un « bon enfant ».


Les jeunes parents ont beaucoup de bonne volonté au départ mais assez vite, ils en viennent à l’énervement. Parce que l’arrivée de l’enfant les a surpris, parce qu’ils ne sont pas habitués, ils sont anxieux (et c’est souvent le cas de la maman), ou parfois trop fiers (et c’est souvent le cas du papa). Ils sont sous pression. Leur enfant est en quelque sorte le reflet d’eux-mêmes, ils le savent. Mais leur première attitude est tout sauf sage: ils se jugent eux-mêmes à travers l’enfant. Ils se demandent « Notre enfant est-il intelligent ? « 

En fait, ils jugent leur intelligence à travers leur enfant. Personne n’accepte d’être idiot aux yeux des autres. On accepte d’être idiot, à la rigueur, mais pas aux yeux des autres. Et pas aux yeux de son enfant. On a besoin de se sentir suffisamment intelligent.

Cette pression les conduit à un déni. L’enfant ne réagit PAS comme ils l’attendent. Regardez, si vous en avez le temps, ces dessins animés célèbres où l’animal a un comportement qui n’a absolument rien d’enfantin, où il agit comme un adulte. Souvent, ces dessins animés sont faits par de jeunes adultes qui projettent leur vision, sans avoir suffisamment observé.

Les jeunes adultes se font une certaine idée de ce que l’enfant a en tête. Ce sont ces idées qui font que le jeune adulte, et parfois de plus vieux adultes, se retrouvent en conflit avec la manière dont l’enfant réagit.

Rapidement, comme les choses ne se passent pas exactement comme ils s’y attendaient, ou comme ils le souhaiteraient, leur manière de parler à l’enfant change. Une fois qu’il a un peu grandi et qu’ils lui ont transmis quelques principes ou habitudes, et qu’il est clair que l’enfant ne comprend pas le dixième de ce qu’ils veulent, ils arrêtent les discours et raccourcissent leurs phrases, leurs mots deviennent:

— Mange ! Va te coucher ! Dépêche-toi ! Ne te décoiffe pas.

Et, se rendant compte de leur brusquerie, ils en rajoutent, pour se justifier et passer pour moins durs :

— Je t’ai demandé trois fois d’aller te coucher. Combien de fois je te dire de te dépêcher ? Ça fait 50.000 fois que je te dis de manger.

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Au lieu de s’arrêter, tout simplement, les parents comblent le silence et leur incompréhension de toutes sortes de mots.

Et le grand danger de ces mots, c’est qu’ils les convainquent. Mais pas seulement : ils insufflent dans l’esprit de l’enfant toutes sortes de choses qui ne devraient pas y être. Notamment le sentiment de ne pas être à la hauteur. C’est de là que vient souvent son agitation, son refus de travailler, et d’autres choses encore, jusqu’à la cleptomanie, le mensonge, la dissimulation etc. En fait, cela vient du fait de l’impression qu’a l’enfant de ne pas être très intelligent.

Il a compris qu’il ne vous a pas compris.

Au lieu de prendre le temps, on a inconsciemment une image de « gosse réussi » et on se la donne en exemple ou on la donne à son propre enfant.

Il est très urgent de dire à ces jeunes parents qu’il n’y a pas et qu’il n’y a jamais eu de modèle d’enfants. Il n’y a tout au plus que des modèles d’éducation. On ne peut pas appliquer les process industriels aux enfants.

Modèles

Il n’y a pas de modèle d’enfants parce que tous les enfants sont différents. Cela signifie que l’éducation de chaque enfant va différer de celle des autres. Nous ne disons pas que chaque enfant va recevoir une éducation sur-mesure, totalement différente : tous les enfants d’une même fratrie recevront les mêmes bases, mais le parent perspicace saura quel complément, ces petites choses spéciales, ce petit quoi qu’il va donner à chacun, souvent même en secret, en fonction de ses besoins et de ses aspirations.

L’enfant va grandir aussi parce qu’il aura reçu quelque chose de spécial et rien que pour lui. Parce qu’il aura été privilégié à un moment donné, il aura vécu un bonheur.

Parcours

L’enfant de parents ayant fait des études ne sera pas conduit à devenir un artisan, il sera spontanément conduit à faire des études, même si sa nature fera que ces études l’ennuieront et le rendront malheureux. L’enfant d’ouvriers sera sensiblement conduit à rester dans son quartier. En l’occurrence, ce n’est pas l’amour de l’enfant qui compte, mais une certaine forme d’égoïsme ou de peur des parents. Et derrière les parents, il y a l’ambition du groupe. Bref, ce n’est pas la recherche d’une voix juste mais simplement la routine. Vous avez évidemment le cas contraire: l’ouvrier qui tient absolument à ce que son fils fasse des études, alors que ce garçon déteste cette idée.

Il y a des intelligences actives et d’autres passives; certaines sont vives et d’autres sont lentes; certaines sont pusillanimes et volètent partout, d’autres au contraire sont persévérantes et s’accrochent à une seule chose longtemps; certaines sont soumises et d’autres sont dominatrices; certaines sont créatrices, d’autres sont conformistes. Il existe des mémoires exceptionnelles et d’autres médiocres, une habileté à se servir des connaissances ou le goût pour l’hésitation. Il existe des croissances précoces et d’autres qui sont attardées, il existe des passions et des curiosités.

Dans chaque tempérament, il y a eu des gens fantastiques

Dans chacun de ces types, et dans tous les autres, dites-vous qu’il y a eu au moins un génie ou un saint dans l’histoire de l’Humanité. Il n’y a pas de tempérament privilégié, contrairement à ce que vous rabâche la presse à gros tirage et les syndicats d’enseignants, de type d’enfants plus intelligents que les autres.

À force de résignation, les parents n’ayant pas réussi exactement ce qu’ils comptaient obtenir, en viennent à se dire : pourvu qu’il ait son brevet des collèges, ce sera toujours ça.

L’école agit de la même manière ; de même, toute la société. On propose à l’enfant des voies qui existent déjà, sans jamais lui demander si lui ne pourrait pas en inventer une autre. C’est assez remarquable si l’on songe que 50 % des métiers actuels n’existaient pas il y a 10 ans : des métiers inventés par des gamins à qui on a dit: « Lancez-vous ! » dans les grandes entreprises américaines, canadiennes, chinoises ou indiennes, et même en-dehors des entreprises, à la sortie de la fac, ou en ayant raté la fac. Il est indiscutable qu’il y aurait dans chaque génération 10 fois plus de candidats à l’artisanat qu’on ne le pense, si l’on songeait que la créativité actuelle des plus grosses entreprises mondiales passe par un énorme travail artisanal de haute technologie. Notre société aurait pu y songer avant de conduire tant de jeunes vers le chômage en passant par les diplômes (dont nous avons déjà parlé).

Voici notre conclusion:
Il ne s’agit pas de se demander : « est-il intelligent ? », Mais « comment est-il intelligent ? »

Ce que nous voudrions aujourd’hui, c’est de méditer cette question. Nous avons appris ensemble, depuis que vous êtes membre de ce blog, à poser des questions plutôt qu’à faire des affirmations. Vous avez beaucoup gagné. Voudriez-vous prendre l’habitude, avant d’affirmer quelque chose, d’essayer de poser la question à l’enfant ?

Tenez, au lieu de lui dire: « Tu me casses les pieds », demandez-lui « comment est-ce que tu pourrais me casser les pieds autrement ? » ça l’amusera, vous aussi, et nous vous envoyons 10€ par Paypal s’il ne change sur-le-champ…

Plus vous économiserez vos paroles, mieux l’enfant vous écoutera. Plus le rapport de vos relations sera intelligent.

Ce qu’est un « bon enfant »

Demandons-nous ce qu’est un bon enfant.

« Bon » peut signifier beaucoup de choses pour les parents. Tout petit, ce sera un enfant qui ne nous réveille pas la nuit, plus tard ce sera un enfant qui restera sage, ne bougera pas trop, plus tard ce sera un enfant qui ne parlera pas trop, ou dira des choses admirables, un enfant qui attendra qu’on ait fini de téléphoner pour nous adresser la parole, qui sera toujours serein et confiant, qui ne pleurera pas sans cesse, qui rendra service fréquemment.

Pénible sera l’enfant capricieux, qui crie sans que l’on sache pourquoi, et qui fait vivre à sa mère tant de moments désagréables.

Par nos agacements, nos emportements et nos colères, qui sont naturelles, nous nous façonnons une certaine image de l’enfant idéal.

Il y a deux choses que nous faisons inconsciemment. La première consiste à guider l’enfant vers de plus grandes maîtrises. La deuxième vers laquelle nous sommes conduits malgré nous, c’est de vouloir changer sa nature. L’une est souhaitable, l’autre fort malencontreuse.

Un enfant qui dort mal, qui a des mouvements vifs, qui pleure, qui s’énerve rapidement, qui parle trop vite, qui est maladroit, qui entre dans votre chambre sans prévenir (et cela pour la 5e fois), bref un enfant qui fait ces choses que vous détestez, a certes grand besoin d’être guidé vers plus de maîtrise, mais n’a surtout pas le besoin de changer en profondeur. Car tout ce qu’il fait, tout ce qu’il manifeste, est l’écho de son tempérament profond. Tous ces défauts insupportables sont les viviers de ses futures qualités. Il a besoin d’une soupape de sécurité. Réjouissez-vous qu’il fasse toutes ces erreurs à la maison, dans sa jeunesse, car tout cela constitue son apprentissage et lui évitera de les faire dans l’âge adulte. Ne soyez donc pas tant pressés de le sermonner, de le corriger et encore moins de le juger. Ajustez-le en lui donnant à faire des choses.

Ne soyez pas pressées, mamans, de le condamner au nom de votre fatigue. C’est vrai que l’agitation des enfants nous épuise, souvent on attend le lundi avec impatience, ou la rentrée.

Mais on a vu plein d’enfants qui étaient particulièrement énergiques dans leur famille, se révéler plus tard des adultes atones, silencieux, apathiques. C’est ce qui arrive à un enfant dont on a excessivement bridé l’énergie. De même, si vous sanctionnez trop sévèrement une audace, un culot, vous risquez de faire un enfant lâche.

L’intention n’y est pas

En réalité, il y a très peu de chances que l’enfant fasse du mal. Pour ce qui est de l’agitation, de la maladresse, de la distraction quand il entre dans la chambre sans frapper, du bavardage, tout cela n’est pas intrinsèquement mauvais, c’est simplement gênant, cela demande l’apprentissage de la maîtrise.

Prenons même le cas où l’enfant est grossier. Bien souvent, l’enfant utilise des mots grossiers non pas dans le but d’exploiter le mauvais ressort de ces mots – l’intention n’y est pas -, mais dans le but de se faire remarquer, de paraître plus grand, de paraître aguerri, ou simplement de manifester un agacement. Or, bien souvent, nous prenons ces mots en tant qu’adultes, c’est-à-dire comme des insultes faites pour blesser. On voit, dans cet exemple, que c’est nous qui donnons à tous ces petits événements de la vie de l’enfant une dimension qu’ils n’ont pas forcément.

Vous le comprenez très bien quand un tout petit enfant de quatre ans dit le mot « connard » : ce serait très maladroit de le sermonner. Il suffit juste de lui indiquer qu’il ne faut pas dire ce mot. En fait, il a employé parce qu’il l’a entendu et qui lui a semblé que ce mot était un mot de grands ; il est évident qu’il n’a voulu faire de mal à personne. Eh bien, à un degré divers, c’est la même chose pour des adolescents. En utilisant un vocabulaire si possible détestable, ils sont beaucoup moins dans l’intention de vous blesser que dans l’intention de se faire remarquer, de paraître plus vieux, plus modernes, décomplexés, libres. C’est à vous à leur apprendre que tout ce qu’ils souhaitent atteindre en l’occurrence, ils l’obtiendront mieux en parlant bien. C’est à vous à avoir fait tout le nécessaire pour que l’intention de vous nuire ne lui soit même pas venue à l’esprit. Parce que vous avez dosé votre amour avec une juste dose d’autorité et que les deux, ensemble, font que l’enfant vous respecte énormément.

Bref, enseignons la maîtrise, et ne cherchons pas à modeler le tempérament.

Et la maîtrise passe par des exercices réguliers.

Dans cet article sur l’intelligence, on voit à nouveau que l’intelligence reflète l’activité du cerveau et qu’on peut être très fort sur un domaine et très faible sur un autre: simple question d’entraînement, comme nous l’expliquons tout le long de ce blog.

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