Le regard des gens. « Le regard fait l’être. »


Rémy disait « Le regard fait l’être » dans l’un de ses articles et cela inspire  ce texte à Sonia. 

« Le regard fait l’être ».

On est influencé par le regard des gens

Regards bienveillants, admiratifs, aimants, qui nous enveloppent à la naissance et nous accompagnent pour la vie. Même si ces regards-là se sont éteints  depuis longtemps ! Pour les enfants aveugles c’est la voix qui intervient ; voix aux mille nuances, aux couleurs variées ; qui enveloppe, admirative, aimante. Voix qui ouvre la nuit. Si le regard et la voix sont chargés d’indifférence, de haine, de reproches infondés, l’enfant est blessé. Certains restent blessés à vie, pour leur malheur  ou pour celui des autres. Et nous-mêmes, les plus heureux que nous soyons, n’avons-nous pas gardé  au plus profond de nous certains regards de mépris, de découragement qui nous fragilisent encore ? Tout cela n’est pas de l’imagination… j’aime  votre réflexion et cette crainte que je soupçonne : « Quel regard je porte sur le monde et sur moi-même ?  Suis-je trop indulgent, pas assez ? » En tout cas, c’est toujours ma préoccupation.

D’autres regards existent,  salvateurs : des regards neufs, neutres, sans préjugés, les regards des personnes qui ont un a priori positif. Ils sont précieux pour qui veut refaire sa vie, recommencer. Tel enfant ayant eu des difficultés dans un établissement, pour des raisons variées, sera soulagé d’aller ailleurs, dans un endroit où aucune image ne lui colle encore à la peau, et là il fera souvent « peau neuve ».

Regard des autres au sein du groupe

regard des gens, colonies de vacances
Le regard des autres au sein du groupe, spécialement dans les lieux décontractés, représente une pression pour laquelle il faut s’aguerrir

Notre directeur de colonie de vacances avait accepté un enfant à problèmes, ayant manifesté une grande agressivité dans une autre colonie l’année précédente et signalé par l’organisme dont dépendait la colonie.  Rien de cela n’avait été dit aux moniteurs. Les colons sont arrivés en car vers midi. Après le repas, avant de ranger les affaires dans les dortoirs, nous sommes allés « saluer la montagne », profitant du beau temps. En redescendant, j’ai avisé un colon un peu en peine, pas trop bien chaussé, avec un long imperméable pendu à son bras qui trainait sur le sentier. Je lui ai proposé de lui porter son imperméable. Cassant une branche, un autre moniteur lui a fait un bâton de marche. Adorable gamin ! Il nous a parlé des ours, des aigles…  Par la suite ce petit garçon de dix ans a été bien apprécié par tout le monde. Il était assez peureux et moqueur. A la fin du séjour, nous avons su qu’il avait failli ne pas être accepté et qu’il était venu à l’épreuve avec « un dossier » ! Notre regard neutre l’avait sauvé, je pense : nous avait tous sauvés !

Lorsque le regard attendu n’est pas là, l’enfant peut en ressentir du dépit, du chagrin et se démotiver.

Je prenais dans ma salle de rééducation Vincent et Joud, enfants d’un CE2 chargé, très agités tous les deux et inattentifs. Mon projet était de les laisser entrer dans une activité et de les aider à la mener le plus loin possible, calmement.

Ces regards construisent leur image

Ce jour-là Joud faisait  une construction compliquée en mettant en équilibre des briques en plastique. Cela accaparait toute son attention. Vincent passait de la corde à nœuds à la balançoire puis remontait jusqu’au plafond en cherchant à trouver des manières différentes  de s’accrocher aux cordes, que je comptabilisais. Soudain, Vincent a laissé les cordes et a quitté la salle en claquant la porte. Il était sorti de la cour et se tenait près du portail qui donnait sur la place du village.

Très perplexe, j’ai décidé de ne pas intervenir et dit à la fillette interrogative de continuer sa construction. Au bout d’un long moment, Vincent est revenu dans la salle. Nous l’avons reçu  sans aucune réprimande et je lui ai demandé pourquoi il était parti. Alors plein de reproches il a dit à Joud : « Tu ne me regardes pas ! » Peine de cœur ?! Joud a assuré qu’elle était contente d’être avec lui. Il m’avait donné une clef. J’en ai parlé au maître. Il a su le calmer chaque jour de quelques mots et quelques regards bienveillants.

Et le comportement de l’enfant s’est bien amélioré. Il n’a plus eu besoin de séances dans ma salle. (Une tout autre question : par la suite nous avons pensé que les équilibres  fragiles que la fillette affectionnait avaient un rapport avec l’angoisse de ne pas réussir. Le maitre avec qui j’ai eu un très grand plaisir de travailler a gradué soigneusement les exercices qu’il proposait pour que tous ses élèves puissent  y travailler sans échec total. C’était simple comme un bonjour et efficace !)

 Une palette de regards

Une palette de regards et de paroles fait l’être. Pour les enfants, reflets d’eux-mêmes dans les yeux des adultes, des pairs surtout, ces regards  construisent leur image.  Regards multicolores : interrogateurs, étonnés, provocants, froids, rieurs, complices… Mon Dieu ! Faites qu’il n’y ait pas de regards blasés de celle ou celui qui aurait tellement l’habitude de les regarder ! De celle ou celui qui les aurait toujours sous les yeux ? Toute la journée,  le regard d’un seul adulte suffit-il ? N’est-ce pas  un manque de l’école à la maison, cette absence de regards croisés ? Comment y suppléer ?

Puis, il y a les regards fuyants. Ce sont des frustrations, des interrogations, du froid pour ceux qui les subissent. « Il ne me regarde pas ! » disait une maman désespérée  en parlant de son petit enfant.  Un diagnostic d’autisme a été fait. Et, petit à petit l’enfant qui n’a pas été maintenu dans cette case d’enfant défaillant, a appris à regarder. Son regard sur le monde s’est ouvert,  il accepte le regard des autres sans crainte. Ce mieux-être qui s’exprime autour du regard nous montre l’importance que cette fonction un peu mystérieuse peut occuper.

Cependant, ayant fréquenté des personnes aveugles, j’ai pu constater chez certaines, leur rayonnement chaleureux, leur perspicacité, que beaucoup de voyants pourraient leur envier. C’est quoi  voir exactement ?

Notre commentaire:

Le regard des gens nous construit. Votre regard construit votre enfant. Il faut y prêter une grande attention. Chaque situation demande un regard particulier. Parfois même, le regard doit être neutre.

Il y a un grand secret: lorsqu’on pense très fort « je t’aime » en regardant notre enfant, il le sent.

On peut aussi conquérir sa propre personnalité rayonnante en travaillant son regard, en pensant à regarder les gens d’une manière appropriée lorsqu’on leur parle.

 

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